Un peu d’histoire
Au début des années 1930, l’Union soviétique engage un vaste programme de modernisation de son arsenal militaire. Dans un contexte international tendu et avec la volonté affirmée de faire entrer son armée dans l’ère moderne, Moscou ambitionne notamment de doter son infanterie d’un fusil semi-automatique, capable d’augmenter significativement la cadence de tir par rapport aux traditionnels fusils à verrou.

Deux ingénieurs de renom, Sergueï Simonov et Fedor Tokarev, sont alors missionnés pour concevoir une arme répondant à ces nouvelles exigences. Chacun développe un prototype, mais c’est finalement le modèle de Simonov, l’AVS-36, qui est retenu à l’issue des essais. Capable de tirer en semi-automatique et en automatique, le fusil est considéré comme novateur pour son époque. Toutefois, l’entrée en dotation de l’AVS-36 au sein de l’Armée rouge révèle rapidement des défauts préoccupants : manque de fiabilité, fragilité mécanique et complexité d’entretien.

Conscient des limites de l’AVS-36, le haut commandement soviétique décide de se tourner vers le projet concurrent de Fedor Tokarev. Ce dernier, qui avait poursuivi le développement de son arme en parallèle, propose un nouveau fusil : le SVT-38. Ce modèle, fonctionnant à l’aide d’un piston à course courte et d’une culasse basculante, est adopté en 1938 et sa production débute en juillet 1939.

Le SVT-38 est ambitieux : il doit progressivement remplacer le Mosin-Nagant et répondre aux besoins d’une armée en pleine mutation. L’Union soviétique prévoit alors une production massive de deux millions d’exemplaires entre 1939 et 1942. Mais rapidement, de nouveaux obstacles émergent. L’épreuve du feu survient lors de la guerre d’Hiver contre la Finlande, où les conditions extrêmes mettent en lumière des failles du fusil : un encrassement trop rapide, un chargeur détachable susceptible de s’éjecter accidentellement, et une précision insuffisante pour un emploi avec lunette optique.
Le bilan est sans appel : la production du SVT-38 est interrompue dès avril 1940, après environ 150 000 unités fabriquées.
Déterminés à doter leurs troupes d’un fusil semi-automatique performant, les Soviétiques réagissent rapidement. Ils mettent au point une version révisée, le SVT-40, qui corrige la majorité des défauts de son prédécesseur tout en simplifiant sa fabrication. L’arme, allégée et dotée d’un mécanisme légèrement modifié, adopte un nouveau système de verrouillage du chargeur et bénéficie d’une production rationalisée. Le SVT-40 entre en production à grande échelle à partir de l’été 1940. Toutefois, son objectif initial — remplacer totalement le Mosin-Nagant — ne sera jamais atteint. L’invasion allemande de juin 1941 (opération Barbarossa) provoque des pertes massives en matériel, dont une large proportion de SVT. Malgré cela, plus de 1,6 million d’exemplaires du SVT-40 seront produits au cours du conflit.

Une variante automatique, l’AVT-40, voit également le jour. Cette version modifiée du SVT-40 est capable de tirer en rafale, mais elle souffre d’un manque de contrôle au tir. Rapidement, l’usage de cette capacité est interdit et la majorité des AVT-40 sont reconvertis en semi-automatique pur.
Le SVT-40 ne manque pas de qualités : il offre une cadence de tir plus soutenue par rapport au 91/30 et une prise en main relativement moderne. Mais son efficacité souffre toujours de quelques faiblesses persistantes. Les incidents de tir liés à l’encrassement demeurent une préoccupation, surtout dans les conditions éprouvantes du front de l’Est.
La précision, suffisante pour un usage classique, reste en revanche trop aléatoire pour un emploi systématique comme fusil de tireur d’élite, même si certains SVT sont équipés de lunettes.

Au tir
Une fois sur le pas de tir, le SVT-40 se révèle être une arme particulièrement agréable à utiliser. Son recul, bien que présent, reste parfaitement maîtrisable grâce à un poids bien réparti et à un frein de bouche efficace — ce dernier, toutefois, se montre assez bruyant pour les tireurs voisins. Par rapport au Gewehr 43 allemand, le SVT-40 offre une impulsion de recul plus douce, ce qui autorise de longues sessions de tir sans gêner excessivement l’épaule. Seul bémol : sa crosse droite a tendance à heurter le casque antibruit, ce qui peut nuire au confort.

Les organes de visée reprennent les standards soviétiques de l’époque : un guidon massif protégé par des oreilles latérales et une hausse réglable jusqu’à 1500 mètres. Malgré une détente un peu trop filante, la précision du modèle essayé s’est montrée très satisfaisante, à condition de bien maîtriser son départ.

L’arme, bien que dépassant le mètre de long, reste équilibrée et maniable. Les commandes principales sont bien positionnées et faciles à atteindre, à l’exception du levier de sûreté qui impose un changement de prise en main. Le réapprovisionnement du chargeur est simple, mais demande de l’attention : (ce qui suit en gras : à mettre en exergue) les bourrelets des cartouches ne doivent pas se chevaucher pour éviter tout incident d’alimentation. Une fois correctement chargé, le SVT-40 offre une fiabilité remarquable. Il peut également être alimenté par lame-chargeur via une encoche située au-dessus du boitier de culasse.
Enfin, l’insertion du chargeur suit une logique proche de celle du fusil Kalashnikov, avec une accroche frontale suivie d’un basculement arrière. Le verrou de chargeur, situé devant le pontet, peut être rabattu pour éviter un décrochage accidentel.
